
Bonjour...euh, vous allez bien? ... Je vous imaginais plus grand ou plus gros ! Arrêtez de me fixer, ça me fait rougir. Bref...Alors...oui...Alors voilà, moi c'est Héloïse Mauss, j'ai vingt-quatre ans et je viens d'une autre planète, sauf si j'en crois ma psychiatre. Je veux dire, depuis que je suis née j'ai ce « délire » en moi, on a beau me dire que mon sang n'est pas vert, mes songes eux le sont restés. Je me suis toujours sentie aliénement proche de Fox Mulder ou d'Albert Camus. Vous aimez les noisettes ? A dire vrai ou à vrai dire, j'ai passé les dix premières années de ma vie recluse dans une grotte au Népal, élevée par une famille de Lamas, douce et aimante ; un groupe d'ethnographes français m'a découverte par hasard, un jour, sans raisons. A sa tête, monsieur Marcel Mauss. Vous devez le connaître, car oui, comme Nicolas Bedos, Marine Lepen ou Charlotte Gainsbourg, j'ai un papa célèbre. Du moins, davantage que mon premier père qui est resté l'illustre inconnu lama des troupeaux asiatiques. Ma vie se déplie en mon nom : extorquée de mon monde sauvage, on a fini par m'éduquer, puis m'humaniser d'une façon si brusque et obsessionnelle qu'aujourd'hui encore j'ai des envies d'herbe grasse que je refoule à coups de martinets dans le dos. Mon protecteur a tenu à de me baptiser du titre de son mode d'emploi : c'était un amoureux de Jean Jacques Rousseau. Je suis le résultat d'une théorie dont madame de Staël fut aussi le cobaye. Marcel...Papa... culpabilisait parfois de m'avoir tirée du Paradis originel, celui des animaux , des cerveaux faibles, des bouffeurs qui se foutent des dates de péremption. Son éducation chrétienne l'y poussait, il se rappelait d'un conte où la pomme tombait dans la paume, et le monde stagnait sans conscience. Mais, paradoxalement, envers et contre tout ce déterminisme, son imaginaire d'anthropologue le rassurait, à chaque introspection il concluait par : « je l'ai sauvée » et cette pensée adoucissait ses névroses !

De mes primes souvenirs, à maintenant j'ai toujours regardé le ciel d'un ½il familier, et porte moi les effluves d'une peut être précédente vie ou véritable nature. Oui, je sais je ne suis pas martienne, arrêtez de jouer ma psychiatre !!! Si vous me demandez tiens par exemple de me décrire, ce serait tout naturellement que je vous planterai le portrait d'une grande femme maigre et verte, dont les yeux rougeoient dans le noir et qui salive tout le temps. Non, je ne suis pas brune, je ne suis pas petite. D'autres fois je vous le concède ce serait plutôt comme un gros caillou plein de boue capable de se mouvoir et de parler, ce qui n'a aucun rapport avec l'espace sauf si je rajoute que ce caillou aurait été auparavant comète ou projection d'apocalypse lointaine. Alors quoi ? Ne sont-ce pas des miroirs ?
Je suis poète parfois, souvent j'aime lire. C'est un reflet de ma personnalité qui n'est pas déterminé en l'occurrence, mon père détestait que je lise autre chose que les dix commandements ou la vie des oiseaux britanniques. J'ai résisté et clame Dostoievski, Zweig, Céline ou King mes princes charmants. Je sens les laves bouillonnantes percer le silence là-bas, où mon regard ne porte plus, c'est viscéral tout comme j'entends chaque météore chuter sur la terre. Je vois par les yeux de chaque race et de chaque espèce, quand je le désire et où que je sois. Mon esprit voyage d'un bout à l'autre du monde, c'est un vaisseau, je suis son pilote. C'est surnaturel, je sais, ça s'appelle la littérature.
Quand, enfermée dans les quatre murs de cette chambre j'essayais d'exister, mon ½il gauche confrontait le noir en lisant tandis que mon ½il gauche dans l'oreiller reposait.

Enfant, je vivais sans chercher à nommer le monde, à l'expliquer, ce trouble du silence neuronal allait de soi, de même que j'étais oisive, simplement heureuse, que le temps ne passait pas.[«Pleurs »] Plus j'ai pénétré ce monde à la suite des années, plus j'ai avancé dans son espace, plus j'ai désiré pailleté le décor de mots délicats et réciproquement j'ai découvert que ces mots étaient sonores et parlants. Certains disent les choses comme éclatent les feux d'articles, « fusée », « papillon », « lavandière », ne voyez-vous pas les étincelles, les gouttes d'eau et les battements d'aile ? D'autres écoulent leurs sens lentement, comme un ruisseau sous le barrage, tels que « floraison », « immerger », « dodeliner ». Un laborieux dring agaçant parfois fait l'essence d'autres mots. Ainsi, « vomis », « allégoriquement », « rustre » m'insupportent comme un appel publicitaire sur ma ligne privée. Ce plaisir de penser et de me définir autrement m'a longtemps fait défaut. Dans le centre où j'étais, les enfants refusaient de jouer avec une personne qui pouvait se dire « Goliath » un jour, « Casimir » le lendemain. A vrai dire ou à dire vrai,ce type d'attitude m'a déréglé, mais au juste, qui ne l'est pas ? Au jour de mon arrivée dans votre civilisation comme étrangère, je n'étais plus un lama, pas encore une humaine, il me fallait être extraterrestre, « en dehors du monde ».
Héloise Mauss, OUI, c'est le nom d'une victoire de l'homme sur l'homme, d'un dompteur sur sa chèvre, d'un anthropologue sur son indigène préférée. Ayant eu le droit cette année de quitter mon asile, pour comportements sociaux adaptés, me voici créant ce blog à la découverte du monde entier. Mon père allant devenir mon lecteur le plus assidu, je le salue.
J'écris en direction de l'humanité, je suis une rescapée, une métamorphosée qui cherche à exister. Sans vous mentir, au début j'ai d'abord cherché une aide à domicile, car la vie hors de l'asile sonne vraiment différente, et que je n'allais pas manger dans la main de mon père qui par ailleurs travaille actuellement au Mexique.
J'ai un mot : indépendance, celle d'être qui je veux être par ce que je sais de moi seule. De même, ce blog sert à mes chroniques de lecture, raconte mes histoires, mes rêves, mes projets comme tous les blogs, parce que je suis comme vous membres du bas peuple et afin, aussi,...[J'ai le hoquet].. comme me disait ma psychiatre, de me débarrasser du surplus émotionnel engrangé lors de ma vie mouvementée. J'ai lu quelque part en effet, que l'écriture pouvait servir de thérapie, démêler le faux du vrai, diviser l'éclat de l'intelligence des illuminations, apporter une vision claire des choses par-delà les névroses si on était capable de s'y confier totalement. Quelle curieuse mais fascinante expérience ! J'espère...j'espère que nous serons bons amis, car je n'ai pas d'amis, et que vous serez heureux d'écouter par moi comme moi, les vastes scintillements de l'univers. J'ai tant à vous dire et à savoir du monde, parlez-moi !
Ceci est mon premier article, à peine une heure après son ouverture sur ce site, et comme je ne sais pas encore bien manier l'internet, pardonnez-moi de ne pas répondre tout de suite à vos centaines de commentaires. Bien à vous, et bienvenu(e)s dans mon monde.
Héloise.
